Le poète cubain H.Padilla est mort en septembre 2000, aux Etats-Unis,
d'une crise cardiaque. Il enseignait à l'Université d'Auburn la littérature
latino-américaine. Il fut persécuté par le régime cubain quand il publia son
meilleur recueil de poèmes Fuera de Fuego,
en 1968. Jugé contre-révolutionnaire, le livre fut tout de même publié, mais
accompagné d'une préface très hostile de l'Union des Ecrivains et des
Artistes de Cuba. Padilla fut incarcéré par le régime castriste pendant cinq
semaines, puis contraint à lire son autocritique. Il fut autorisé, en 1980, à
rejoindre son épouse aux Etats-Unis. Voici, traduit par Aurore Latorre, un poème
extrait de Hors-jeu, un des recueils
essentiels du XXème (publié en
France en novembre 1968, par Le Seuil)
Les Poètes
cubains ne rêvent plus
Les poètes
cubains ont cessé de rêver
-
même la nuit ils ne rêvent plus -
Quand ils écrivent
tout seuls avec eux-mêmes ils ferment la porte
Quand soudain
craque le bois,
Le vent les
pousse à la dérive,
Des mains les
empoignent par les épaules
Leur font faire
demi-tour
Les confrontent à d'autres visages
(enlisés dans
des marécages, se consumant dans le napalm)
et le monde
afflue à leur bouche
et l'œil est
obligé de voir, de voir, de voir.